sébastien jour 2 /le 16 juillet 2012/ d’après Folies du jour photographique les scènes de travestissement de Claude Cahun par Mireille Calle Gruber in TRAVESTISSEMENT FÉMININ ET LIBERTÉ(S)SOUS LA DIRECTION DE GUYONNE LEDUC (L’HARMATTAN)
Qu’est ce que le travestissement lorsqu’il est fait de la lumière et de l’ombre?
Lorsqu’il y va d’un travestissement ou transvestissement en photographie : se travestir pour prendre les rayons du jour, et s’y prendre, imprimé, noir et blanc, à l’entame des surfaces pelliculaires.
Se travestir des jeux d’éclairages en quoi consiste l’opération photographique.
Et ne jamais lâcher l’ombre pour la proie.
Quel que soit le vêtement, c’est l’habit de ténèbres et de clarté qui habite le sujet de la photographie, qui le trame, le révèle à la page.
« Ne jamais lâcher l’ombre pour la proie ». C’est la devise de Claude Cahun photographe et écrivain, requise aux divisions de l’être, à ses poses et expositions, à ses apparitions.
Car c’est depuis l’ombre, depuis et en vue de la chambre noire,qu’elle se survoit,se surseoit, qu’elle s’apparaît,et s’appareille.
Les yeux photographiques, les yeux du travestissement photographique ne forment pas un regard : un oeil porte voile sombre, l’autre un éclat de jour, ou plutôt il porte un coup de métonymie : un reflet de fenêtre devenu lame de verre plantée dans l’iris comme un coup de couteau (…)
Avec claude Cahun, ici, l’image d’une croisée fait la croix sur l’oeil, cependant que l’autre porte une taie d’obscurité et que le noir se répand sur l’unique surface du papier.
On l’a compris: le travestissement dans ce qui va suivre, ne constitue pas seulement la déclinaison des entrées de ce mot, à savoir: le travestissement en tant que déguisement. falsification. travelo.en tant qu’il s’agirait de prendre le rôle d’une personne de sexe opposé, ses vêtements, ses comportements. d’inverser les rôles.
Certes il s’agit bien de tout cela mais indissociablement de la scène qui, pour Claude Cahun, constitue le travestissement, cad en tenant compte de la spécificité technique de l’art photographique qui fait du travesti un espace d’exploration du théâtre de la cruauté.
Ce sont, par la suite les enjeux esthésiques et esthétiques à l’oeuvre qui requerront l’analyse. CLaude Cahun n’est pas un travesti : c’est devant l’oeil de la caméra, le troisième oeil, celui de la création- l’oeil de Dieu- qu’elle s’éprouve et se tient à l »exercitation. L’apparence physique est mise en question, examinée, estrangée, et le propre sang, la souffrance viennent à la surface, dedans au dehors, dans ce qui n’est pas un faceà face mais la scène des effets d’aveuglements successifs et de leur retournements momentanés. C’est le propre sang qui fait surface et travestit pour-de-vrai:
je me fais raser les cheveux. arracher les dents, les seins- tout ce qui gêne ou impatiente mon regard- l’estomac, les ovaires, le cerveau conscient ou enkysté. Quand je n’aurai plus qu’une carte en main, qu’un battement de coeur à noter, mais à la perfection, bien sûr je gagnerai la partie.
Et ceci qui va de pair, où l’art fausse l’image, et le corps costume le corps/ » me faire un autre vocabulaire, éclaircir le tain du miroir, cligner de l’oeil, me flouer, au moyen d’un muscle de raccroc tricher avec mon squelette. »
Déménagement du corps